26 mai 2010

Stagiaires

Formation des enseignants : le recteur reste sourd à la mobilisation

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Cet article n'est probablement plus d'actualité

1521 signatures de quelques cinquante équipes pédagogiques qui refusent d’être « tuteurs » dans le cadre du compagnonnage et donc la mise en place de la réforme de la formation des enseignants Chatel-Pécresse ont été remises au recteur.

Le rassemblement devant le rectorat le 20 mai de la FSU et de la FCPE n’a rien d’une action minime. Devant le refus collectif de la mise en place du compagnonnage - le seul dispositif sur lequel le gouvernement entend assurer la formation des enseignants -, le rectorat de Grenoble est en réelle difficulté pour l’application de son projet de formation des futurs lauréats des concours.

Suite à ce rassemblement, une délégation composée du SNES, du SNEP et du SNUEP a été reçue le vendredi 21 mai par le recteur, en présence de son directeur de cabinet et du secrétaire général sur la question de la formation des futurs enseignants du second degré dans l’académie de Grenoble.

 Nous y avons dénoncé un dispositif qui repose sur un double bénévolat : le bénévolat forcé des tuteurs qui devront assurer en plus de leur service la formation des stagiaires pour une durée de 6 heures hebdomadaires et dont les échos des IPR font état d’une rémunération inférieure à 2 HSA ; le bénévolat des stagiaires qui seront employés à 133%, assurant en plus d’un temps plein, 6 heures de « formation ».
 L’état d’esprit des collègues a également été au centre de nos interventions ; les pétitions remises témoignent d’une réelle mobilisation des collègues devant un dispositif qu’ils ont tout d’abord cru impossible, dispositif qui se révèle être l’un des pires des dispositifs académiques. La situation est aujourd’hui une situation de crise à laquelle le rectorat doit faire face. En appelant les probables « tuteurs » à leur domicile le week-end, le corps d’inspection exerce de lourdes pressions sur nos collègues que nous avons dénoncées.
 Le second point de notre intervention a porté inévitablement sur la liste des supports et ses conséquences pour les stagiaires et l’ensemble des collègues : des supports sur plusieurs établissements, des supports éloignés aux marches de l’académie, dans des collèges difficiles dont un pour lequel il est prévu de ne pas affecter de néotitulaire, et les conséquences directes sur le droit à mutation de l’ensemble des fonctionnaires.
 Enfin, nous n’avons pu que dénoncer le sacrifice des futurs stagiaires qui seront placés dans des situations intenables, et pour lesquels nous pouvons craindre un grand nombre d’abandons devant les difficultés de prise en charge des classes.

La réponse de l’administration peut se résumer à une réclame de label musical. Déclinant au niveau académique les discours présidentiel et gouvernemental, le recteur de Grenoble a affirmé qu’il n’avait pas les moyens de faire autrement, expliquant que l’académie de Grenoble n’avait pas les ressources d’autres académies qui ont fait le choix de ne pas affecter toute l’année les stagiaires à temps plein en responsabilité. Mais, à trop répéter un même discours, le disque finit par se rayer et les nombreuses contradictions ne font que ressortir.
 Sur la question des pressions des IPR, le recteur a réaffirmé qu’aucune contrainte d’être « tuteur » ne pouvait exister et que la liste des tuteurs était en cours d’élaboration et qu’elle ne pourrait être finalisée qu’après le mouvement intraacadémique, tout comme la liste des supports.
 Sur la question de la rémunération des « tuteurs », le recteur a confirmé le chiffre de 2000 euros, chiffre qui devrait être supérieur à l’indemnité nationale et pour laquelle le recteur a plaidé la possibilité de la fractionner, afin que ce soit les équipes qui prennent en charge le stagiaire.
 Sur la question de l’éloignement des supports, le recteur a indiqué que la liste a été faite à partir de quelques 1150 supports possibles et qu’ils ont veillé à ces problèmes, en postulant que les étudiants iront tous les jours pendant six semaines dans ces établissements à plus de 150 km de leur domicile, pour la somme de 3000 euros (après le « travailler plus pour gagner plus », c’est le « payer pour travailler »).
 Sur la question des supports difficiles, le secrétaire général nous a répondu qu’il avait eu l’assurance que les stagiaires pourront y être accueillis dans de bonnes conditions par des équipes stables, avec la bénédiction des IPR.
 Sur la question des stagiaires en situation (lauréats des concours internes), le secrétaire général nous a affirmé qu’ils seront affectés comme avant, au plus près de leurs vœux et dans l’académie de Grenoble, alors que la circulaire ministérielle les oblige à participer au mouvement d’affectation des stagiaires, et ne fait plus la distinction entre les anciens « stagiaires IUFM » et les « stagiaires situation ».
 Sur la question du mouvement intraacadémique, les premiers éléments montrent que le rapport entre les postes disponibles et le nombre de demandes de mutation serait cette année supérieure à l’année dernière.

Enfin, combien de questions sans réponse auxquelles le recteur n’a pu que nous répondre que ces questions demeuraient : le bénévolat des stagiaires qui auront leur premier jour de formation avant d’être fonctionnaire stagiaire (il ne s’agit pas d’avoir un accident !) ; le cas des stagiaires qui n’auraient pas de tuteurs. Et également beaucoup de chantiers encore en cours : la liste des supports qui n’est pas encore fixée, la liste des « tuteurs » qui devrait être finalisé fin juin ; le rôle des « tuteurs » dans la titularisation pour laquelle le dispositif académique prévoit une responsabilité lourde du « tuteur » et du chef d’établissement ; les vœux d’affectation des futurs stagiaires pour lesquels nous avons plaidé la possibilité de faire des vœux plus précis que les vœux des ZR retenus pour l’affectation des PLC2.

Finalement, pour le rectorat, le dispositif académique n’est pas seulement contraint par les moyens budgétaires. En bloquant les postes pour affecter les stagiaires qui auront un « service lourd », le recteur pense que les futurs stagiaires auront des conditions de rentrée sereines, misant sur le fait que les équipes pédagogiques ne laisseront pas sans aide ces futurs collègues. En conclusion, cela aurait pu être pire !

Sur toutes ces questions, le disque rayé n’a pu que faire apparaître les contradictions du dispositif.
 Comment affirmer que les stagiaires seront accueillis par des équipes pédagogiques stables dans des établissements difficiles quand on souligne à côté que les « tuteurs » pressentis ont le droit de muter et que la liste ne sera effective qu’après les mutations intraacadémiques (il est bien connu que les établissements difficiles ont les équipes pédagogiques les plus stables !) ?
 Comment affirmer que les étudiants iront remplacer les stagiaires pendant leur stage groupé, alors que l’admissibilité des concours est en novembre et que seuls les « calés » de cette année auront le temps d’avoir préparé a minima ceux-ci ?
 Comment affirmer que l’élaboration de la liste des « tuteurs » s’élabore normalement alors que les IPR font pression sur les collègues pour qu’ils acceptent et que les refus collectifs se multiplient ?

En ne misant que sur notre conscience professionnelle (le recteur a expliqué qu’il avait demandé au ministère la possibilité du fractionnement de l’indemnité de suivi des stagiaires car il serait plus simple aux équipes d’assurer la responsabilité d’une formation équivalente à 6 heures, devant la lourdeur des tâches grandissantes auxquelles nous devons faire face), le recteur a choisi de faire reposer les difficultés des futurs stagiaires sur leurs collègues et fait peser la responsabilité des conditions catastrophiques de formation sur la profession.

- Dès aujourd’hui, il est indispensable de se prononcer massivement contre l’accueil des futurs stagiaires dans de telles conditions, chaque établissement et chaque collègue étant potentiellement concerné dans les semaines à venir (les appels des collègues des établissements proches des lieux de stage se multiplient).
 Il est également important d’informer la section académique du SNES des démarches effectuées auprès des collègues par les IPR, afin de pouvoir garantir à l’ensemble des collègues leur droit.

Le SNES, le SNEP et le SNUEP ont pris leurs responsabilités en laissant la porte ouverte au recteur et en proposant des solutions, tant sur les supports de stage qui peuvent être sur des BMP (le SNEP a indiqué de nombreux blocs d’HSA de plusieurs heures), que sur l’accueil et la formation des stagiaires avec un temps de formation inclus dans leur ORS, et non par l’invention de moyens par le rectorat en faisant assumer leur formation bénévolement par les stagiaires. Sourd à nos propositions, le recteur sera responsable des conditions de rentrée désastreuses et devra en assumer les conséquences.