13 octobre 2022

Sections départementales

Une rentrée « pleinement réussie » !?

Vos représentant.es de la FSU siégeaient au Comité Technique Spécial Départemental le 6 octobre 2022. Voici la Déclaration liminaire portée par les élu.es

Déclaration liminaire de la FSU

Une rentrée scolaire « pleinement réussie »

De nombreux élèves, enseignants et parents d’élèves ont dû être rassurés de découvrir dans le Dauphiné Libéré du 2 septembre que selon vous, monsieur l’Inspecteur d’Académie, la rentrée a été "pleinement réussie". Cela contraste singulièrement avec les retours du terrain que nous avons.

Des élèves ont commencé l’année sans SVT au collège de Vals-les-bains, sans Arts plastiques au lycée Gabriel Faure de Tournon-sur-Rhône, sans Physique-chimie aux collèges de Vernoux et Cruas , sans Anglais et/ou Italien au lycée Vincent d’Indy de Privas, sans documentaliste à Cruas, sans Maintenance industrielle et Maths/Sciences au LP Marius Bouvier de Tournon-sur-Rhône, ou encore sans EPS au Collège de la Voulte sur-Rhône. Cette liste, loin d’être exhaustive, témoigne des difficultés bien réelles et prévisibles pour simplement assurer les heures d’enseignement auxquelles les élèves ont pourtant droit. La rentrée n’a pas été plus réussie en ce qui concerne les personnels non-enseignants : plusieurs postes d’AED étaient non pourvus ici et là. A ce jour des établissements attendent encore une psyEN ; le collège de Cruas est lourdement pénalisé par l’absence de gestionnaire. Pour les AESH, à force de mutualiser ces personnels, l’accompagnement des élèves notifiées se réduit à peau de chagrin car c’est un peu comme s’ils et elles se retrouvaient à devoir partager une toute petite couverture à près d’une dizaine, l’hiver va être long et les accompagnantes écartelées se désespèrent.
Ces manques à notre mission de service public ne sont pas une surprise. Ce sont les résultats des milliers de suppressions de postes effectuées depuis 5 ans dans l’Éducation Nationale et d’une crise du recrutement qui ne cesse de s’aggraver. La casse du service public d’éducation profite aux établissements privés, au détriment des plus défavorisés. Dans notre département et selon vos prévisions d’effectifs, les collèges privés gagnent plus de 100 élèves cette année, alors que les collèges publics en perdent plus de 200.

Les difficultés de recrutement des enseignants s’expliquent par la diminution du nombre de postes ouverts aux concours, par la réforme de la formation initiale, ainsi que par un métier de moins en moins attractif. En cause, les faibles salaires, des conditions de travail qui se dégradent, mais aussi un manque de bienveillance, qui va parfois jusqu’au au mépris des situations individuelles. Il suffit de se pencher sur le sort que l’administration rectorale a réservé aux jeunes collègues stagiaires débutants dans le métier à temps plein. Pour certains et certaines, comme en EPS, des affectations le 22 juillet, pour d’autres, pour une erreur de calibrage, le 22 août, avec le lot de difficultés que cela peut entrainer : EDT à revoir, tuteurtrices à trouver, réaffectations, recherche tardive d’un domicile, etc. Et que dire de la multiplication du nombre de collègues en services partagés sur deux ou trois établissements, ainsi des TZR amenés à remplacer parfois à plus de 70 km de leur établissement de rattachement. D’autres renoncent au temps plein et demandent des temps partiels. Faut-il rapprocher ces situations au recrutement de contractuels, souvent peu ou pas formés, mais affectés avant les TZR, comme le laissait entendre le recteur de Créteil dans une vidéo devenu virale chez nos collègues ? Alors certes, selon la formule, le fonctionnaire fonctionne, le remplaçant remplace, mais est-ce qu’à un moment les ressources humaines pourraient être humaines ? De la même manière, le service public doit servir (équitablement et réellement) tous les publics.

Un politique de la casse

La baisse des moyens qui pèse sur les affectations contribue également à dégrader les conditions de travail et la qualité de l’enseignement. Plusieurs établissements connaissent des effectifs pléthoriques sur certains niveaux ; c’est le cas tout particulièrement à Vals-les-Bains ou la suppression tardive d’une division entraine une surcharge alarmante des classes de 6e. Il faut parfois pousser les murs pour asseoir tout le monde, notamment lorsque des AESH sont présentes. Quel temps accorder à chaque élève, comment différencier et inclure dans des classes à 30 ? La baisse des dotations comprime toujours davantage les possibilités de soutien aux élèves les plus fragiles, qu’il s’agisse de dédoublements, de dispositifs comme fluence, devoirs faits, ou d’accompagnement personnalisé qui n’en a que le nom ! Même les HS restantes tendent à devenir insuffisantes dans nombre d’établissements pour pérenniser les dispositifs existants. Cela est d’autant plus préjudiciable que les difficultés d’une partie des élèves s’est accrue de façon sensible avec les effets des confinements et des absences depuis 3 ans. En témoignent les résultats au DNB qui deviennent alarmants dans certains collèges (en deçà de 75%). Les difficultés liées à l’orientation post-collège s’accroissent également pour les familles et les élèves les plus démunis. Le manque de psyEN n’aide pas, et la demi-journée d’orientation hebdomadaire dès la 5e annoncée par M. Macron dans sa lettre aux enseignants apparait comme un pur effet d’annonce : s’agira-t-il de reprendre des heures sur les disciplines, ou de rebaptiser « parcours avenir » des heures de français, de mathématiques ou d’histoire-géographie ? Quant à la mise en œuvre des projets pédagogiques, essentiels pour ouvrir les élèves sur le monde qui les entoure, il est trop tôt pour mesurer l’évolution du soutien financier du Conseil départemental, mais il faut déplorer l’incohérence du nouveau calendrier qui complique considérablement le travail des équipes et des partenaires.

Déni de crises

Parmi les élèves les plus fragiles, la situation des élèves allophones est préoccupante. Selon votre bilan de rentrée, le département a accueilli plus de 80 collégiennes et aussi des lycéennes réfugiées venues d’Ukraine. Ces élèves ont besoin d’un accompagnement réel tant pour l’apprentissage de la langue que pour faciliter leur adaptation dans notre système. Ces structures existent. Ainsi dans le dossier de rentrée il est indiqué « La mobilisation des dispositifs de type UPE2A présents sur le territoire a été privilégiée dans la mesure du possible ». Toutefois nous n’avons rien vu de cela. La réalité semble plutôt se réduire à des HSE distribuées pour quelques heures de FLE épisodiques, irrégulières et largement insuffisantes. Pour la FSU, c’est de la maltraitance institutionnalisée que subissent ces élèves et ces injustices pèsent lourdement sur le quotidien des personnels qui les accueillent et les voient tous les jours.
Cette situation ne relève plus et ne relèvera plus de l’extraordinaire. Nous avons besoin de structures pérennes, de moyens à la hauteur des enjeux : les HSE ne sont ni l’un ni l’autre ; se rajoutant de manière fluctuante à es services déjà bien chargés, elles ne permettent pas une prise en charge adéquate de cet enseignement spécifique. Les tensions internationales et le réchauffement climatique augmentent mécaniquement le nombre d’élèves dans cette situation. Il faut nous préparer à ces multiples crises en mettant en place des aides qui permettent à ces élèves d’apprendre rapidement le français. C’est une obligation « morale » mais aussi un « investissement » pour l’avenir. La crise ukrainienne doit nous permettre de tirer des leçons sur la gestion de l’accueil des réfugiées.
Il y a une autre crise où notre administration ne semble avoir tiré aucun enseignement : c’est celle du COVID. La maladie n’a pas disparu en un été. Elle tue, hospitalise, laisse des séquelles chez une part croissante de la population dans l’indifférence des médias et des autorités. A l’opposé des mensonges du ministre précédent, il est désormais incontestable que le milieu scolaire est un lieu majeur de transmission. Au risque de rappeler des évidences, les absences des personnels et des élèves continuent de perturber le fonctionnement des établissements et des apprentissages. Les réinfections successives – puisque c’est désormais le seul horizon qui nous est offert – ont une incidence sur la santé de toutes. Or, il y a toujours des personnels fragiles. Nous ne sommes pas égaux face à la maladie. Sur l’ensemble des problèmes soulevés par cette pandémie, l’administration n’apporte aucune réponse sérieuse, le « prenez soin de vous » semble avoir été remplacé par « débrouillez-vous ». Pour prévenir et diminuer le nombre des contaminations, il est urgent et indispensable de prendre des mesures d’ensemble coordonnées pour contrôler et améliorer le renouvellement de l’air dans l’ensemble des espaces clos et bondés, la loi y oblige (renvoyer la responsabilité de l’achat et de l’usage d’un ou deux purificateurs d’air et détecteurs de CO2 à chaque chef d’établissement est absurde). C’est la responsabilité de l’administration et de la collectivité de rattachement de protéger la santé des personnels et des élèves. Quant aux effets sur les apprentissages, ils sont purement et simplement ignorés.
Aucune modification des programmes ni du calendrier des examens, aucun moyen dégagé pour soutenir les élèves les plus fragilisés. C’est un abandon en rase campagne ! Nous avons vécu et nous vivons encore une crise sanitaire majeure dont nous n’avons retenu aucune leçon pour faire face aux prochaines. Il est désormais urgent de changer de politique !