11 février 2020

Retraite et Protection sociale

3 - Le pouvoir ment sur le financement de sa réforme

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Le discours gouvernemental d’une réforme des retraites « à enveloppe constante » est bien rôdé.
En plafonnant les dépenses de retraites à environ 14 % du PIB, alors que la part des seniors dans la population augmente régulièrement, la réforme du gouvernement entraînerait automatiquement une baisse généralisée des pensions, plus exactement du taux de remplacement ( le niveau de la pension par rapport au dernier salaire ).
Nous l’avons écrit partout en dénonçant ce choix budgétaire, cette « règle d’or » catastrophique.

Mais, depuis la présentation du projet de loi en Conseil des ministres et de l’étude d’impact qui l’accompagne ( voir tableau ci-dessous ), on sait désormais que la trajectoire de financement visée par le gouvernement n’est même pas 13,8 % mais 12,9% du PIB en 2050. Contrairement à ce que le gouvernement affirme, il aggrave ce choix et il prévoit bien une baisse des dépenses de retraites plus forte et plus rapide.

En comparant la première ligne de ce tableau, à savoir la trajectoire des dépenses selon le COR ( Conseil d’Orientation des Retraites ) avec les règles actuelles, et la dernière, celle avec les nouvelles règles ( SUR ou Système Universel de Retraites ), on observe que la réforme conduirait à une baisse des dépenses de 0,2 point de PIB en 2025 ( soit environ 5 milliards d’euros ), de 0,3 en 2030, 0,2 en 2040 et encore de 0,3 en 2050.

Il s’agit de la traduction fidèle des mesures d’économie que le gouvernement entend réaliser grâce à sa réforme. D’abord via des « mesures d’équilibre mises en œuvre sur la période 2022-2027 », qui réduiront les dépenses à court et moyen terme et toucheront les générations nées avant 1975. Puis via le passage au système à points, qui permettra de poursuivre ces économies sur la durée en affectant les pensions de toutes celles et tous ceux qui sont nés après 1975 et partiront à la retraite après 2037.

Mais dans le tableau ci-dessus on cherche à « enfumer » le lecteur.

D’abord avec la ligne « effet de la hausse de la DAR [durée d’activité requise] pour les générations 1976 et suivantes » qui mènerait en 2050 à - 0,2% de PIB. Ceci représente les économies qui seraient réalisées, dans le système actuel, si l’on augmentait la durée de cotisation nécessaire pour toucher une retraite à taux plein au-delà de ce qui est prévu par la législation actuelle ( réforme Touraine ). Soit une hypothèse de pure fiction.

Ensuite, avec la 3ème ligne du tableau, la « situation contrefactuelle » ? Que recouvre ce jargon technique ?

Le diable se cache dans les détails …

et il faut décrypter les notes de bas de tableau ou de graphique !!!

La note présentée sous le graphique 58 ( Dépenses constatées et projetées du système de retraite actuel, en points de PIB ) page 174, explicite ainsi l’évolution : « Le scénario contrefactuel est construit à partir du scénario du COR retenant une productivité de long terme de 1,3% et sous l’hypothèse d’une prolongation de l’augmentation de la durée d’assurance requise au-delà des générations concernées par la loi Touraine. »

Et la note 1 de la page 175 de préciser : « Cette situation contrefactuelle intègre une hausse de la durée d’assurance requise d’un trimestre toutes les 3 générations qui est prévue par la réforme des retraites de 2014 jusqu’à la génération 1973. Elle est poursuivie dans cette étude d’impact pour les générations ultérieures jusqu’à la génération 1999, pour tenir compte de leur gain d’espérance de vie, par parallélisme avec la hausse conventionnelle de l’âge d’équilibre dans le système cible ».

Ainsi, dans cette étude d’impact, on trompe, on manipule, on invente des variables qui n’existent pas pour justifier cet objectif : « La réforme systémique a été calibrée de manière à aboutir au même niveau de dépenses à terme qu’en l’absence de réforme, et de viser ainsi un équilibre de long terme du système de retraites  ».

Le gouvernement ose présenter son projet de réforme fondé sur un « âge d’équilibre » en hausse continue ( voir article précédent ) en faisant comme si le système actuel suivait une trajectoire similaire. Mais c’est FAUX. La situation basée sur le système actuel est dégradée sur 30 ans en truquant les données … comme l’avait fait le rapport Delevoye avec ses projections « bidon » qui ne faisaient que des gagnants et surtout des gagnantes !!!

Dans les cas types contenus dans cette étude d’impact, l’entourloupe sur les calculs présentés est aussi énorme de façon à présenter des résultats très positifs grâce au futur système de retraites. Des oublis pour le moins étonnants, des bizarreries et des hypothèses d’évolution farfelues que dénoncent le Collectif Nos Retraites et des nombreux Économistes Atterrés ( cf. article joint ).

Ce projet de retraites est tellement destructeur que le pouvoir recourt encore et encore et toujours à la manipulation car il sait que la transparence en accentuerait le rejet par la population.

Macron, Philippe, Dussopt, Le Maire, Buzyn et Pietraszewski, nous ne sommes pas dupes !!!
Nous continuerons à dénoncer inlassablement vos trucages et à combattre votre réforme.

- Marie-Laurence MOROS -
Étude d’impact
par le Collectif Nos Retraites
Méthode de recalcul des cas-types
par le Collectif Nos Retraites